Le pèlerinage pénitentiel du pape François au Canada

À la foule rassemblée sur la place Saint-Pierre pour l’Angélus du 17 juillet, le pape François a parlé de son voyage historique au Canada, du 24 au 29 juillet, comme d’un « pèlerinage pénitentiel ». Le Comité organisateur n’a eu que deux mois pour préparer ce voyage. Sans parler du fait que nous sommes en pleine vague de COVID-19 et que la santé du pape sud-américain demeure chancelante avec l’âge. Il a dû annuler deux visites pastorales au Liban et en Afrique, sur les conseils du médecin, en raison de douleurs au genou qui réduisent sa mobilité.

François reste tout de même déterminé quand il s’agit d’aller « vers les périphéries », à la rencontre des plus souffrants. Il vient au Canada en humble pèlerin de la paix, écouter, dialoguer et prier avec les peuples autochtones marqués par la tragédie des pensionnats. L’Église canadienne, et surtout celle du Québec, a bien besoin de ce coup de pouce du pape pour avancer sur le long chemin de guérison et de réconciliation, d’où le thème de sa visite : Marcher ensemble. Je crois qu’il saura toucher les cœurs par son authenticité, sa simplicité et son humanité.

En mars 2022, il avait rencontré des communautés autochtones au Vatican, avant de présenter des excuses publiques le 1er avril : « Je demande pardon à Dieu et je voudrais vous dire, de tout mon cœur : je suis très affligé. Et je me joins à mes frères évêques canadiens pour vous présenter des excuses. » Il avait laissé entendre qu’il souhaitait venir cet été présenter des excuses en personne sur leur territoire.

La visite du chef de l’Église sera l’occasion pour les catholiques du monde entier d’entendre parler des Autochtones du Canada, de compatir avec les victimes d’abus spirituels et sexuels. Elle fait partie des recommandations du rapport de la Commission de vérité et réconciliation, publié en 2015. Ce fut long, mais nous y sommes.

Rappelons que le système des pensionnats pour Autochtones a été mis en place par le gouvernement fédéral du Canada dans les années 1870 jusqu’en 1995. Cette puissante machine colonialiste avait pour but de « tuer l’Indien dans l’enfant ». Pour y arriver, on laissa la gérance aux différentes Églises, surtout catholique et anglicane, oubliant que c’est le Christ aussi qu’on agressait en eux : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40).

Il y a eu près de 150 000 enfants autochtones qui ont été retirés de leurs familles et envoyés dans des écoles pour les « civiliser ». Entre 3000 et 6000 enfants sont morts entre les murs des 130 pensionnats, qui se trouvaient surtout dans l’Ouest canadien. On en comptait une douzaine au Québec.

Douloureux rappel du passé

En mai 2021, la découverte des restes de 215 enfants enterrés sur le site d’un pensionnat à Kamloops a rouvert les plaies. C’est dans ce contexte que s’organisèrent le voyage des Autochtones à Rome et la visite du pape François au Canada.

Avec le ton libre qu’on lui connaît, le pape reviendra sans doute sur les thèmes qui lui sont chers, et que nous retrouvons dans l’exhortation apostolique sur l’Amazonie : justice et pardon, dialogue et liberté, écologie intégrale et contemplation, épanouissement des cultures et annonce du Christ. Il écrit au no 7 : « Je rêve d’une Amazonie qui lutte pour les droits des plus pauvres, des peuples autochtones, des derniers, où leur voix soit écoutée et leur dignité soit promue. » Ce rêve peut très bien s’appliquer chez nous.

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